crise dette grèce audit services publics
Vous entendez à longueur de journée parler de la crise et vous ne savez pas quoi penser, vous ne savez pas quoi répondre, vous ne savez pas s'il existe des solutions. Bref, vous manquez d'arguments.
Il y a bien sûr des solutions, mais n'allons pas trop vite.
Voici un texte à présenter à vos amis, parents, voisins pour engager la discussion et comprendre une fois pour toutes ce qui se cache derrière cette crise.
Il serait grotesque de le comparer à un budget de « bon père de famille ». En cas de coup dur (inondation, épidémie, …), l'état commence par investir (construction de digues, d’hôpitaux, …) et ensuite, il perçoit l'argent de l'impôt. Un travailleur, lui, commence par recevoir l'argent avant de pouvoir le dépenser. En cas de coup dur, vous avez déjà vu un pauvre obtenir une augmentation ? Un peu de sérieux.
Concrètement :
En général, les économistes s'arrêtent là. Après, c'est trop compliqué. (Oui mon œil !)
Deux remarques :
La dette vient de deux actions, comme les deux mâchoires d'un même étau : la privatisation de l’emprunt d'état et les cadeaux faits aux riches.
Depuis les années 1970, partout dans le monde, les pays capitalistes ont obligé les états à emprunter à des banques privées (qui, comme elles n'ont pas le droit de créer la monnaie, empruntent à leur tour aux banques nationales). Mais pourquoi cette obligation ? La réponse : un prétexte pour soi-disant lutter contre l'inflation (le gros problème des riches).
C'est quoi l'inflation ? Simplement l'argent qui perd de la valeur.
Par exemple, vous êtes pauvre, vous ne pouvez pas acheter une maison « cach ». Vous empruntez et devez par exemple remboursez 1 000 francs par mois. L'inflation arrive, l'ancien franc est aboli et vous remboursez maintenant 10 nouveaux francs par mois. Nouvelle inflation, passage à l'euro, vous remboursez 1€50 par mois. Bref, plus il y a d'inflation, moins vous remboursez. Comme celui qui prête c'est souvent un riche, il n'apprécie pas.
Autre exemple, vous êtes riche, vous mettez 1 000 francs dans un coffre en Suisse. Vous revenez des années après et vous retrouvez dans votre coffre 1€50. Bref, le riche déteste l'inflation.
C'est là qu'un économiste au fond de la salle dit : « c'est un peu plus compliqué que ça ! ». Ca y est. Vous commencez à comprendre la manipulation des puissants.
Cette privatisation a donc été imposée dans le monde. En France, c'est Giscard (ministre en charge de l'Économie et des Finances) qui se charge de la besogne en 1973. Il a même réussi à le graver dans le marbre du traité européen (souvenez-vous, l'article que vous avez rejeté par référendum).
Vous croyez que nous avons sombré dès que cela a été mis en place ? Non ! Nous sommes plus résistants que cela. Tant qu'il y a équilibre budgétaire, l'effet de cette mâchoire ne se fait pas sentir. Certes, des banques privées profitent des intérêts. Mais, tant que l'on remet les compteurs à zéro chaque année, l'hémorragie est contrôlée.
En fait, depuis des dizaines d'années, les dépenses de services publics n'ont pas évolué. Les gains de productivité fonctionnent aussi dans le domaine social. Par exemple, les frais de gestion dans le public (sécurité sociale) c'est 5%, dans une association (mutuelle) c'est 15% et je ne vous dis pas dans le privé : 30% voire plus. Car, il n'y a pas de limites aux profits des actionnaires. C'est bien normal que le service public coûte moins cher : l'union fait la force. Il y a une hiérarchie : le privé (le chacun pour soit) coûte plus cher que l'association, qui elle-même coûte plus cher que le public.
Pour créer la dette, il fallait donc provoquer le déséquilibre budgétaire. C'est l'objet de la seconde action.
Dans les années 1980 (je vous laisse deviner qui était au pouvoir), les cadeaux fiscaux ont fait leur apparition. Avec autant de dépenses mais moins de recettes, il y a eu apparition du déficit. Il a donc fallu emprunter. Quel montant ? Eh bien le montant des cadeaux faits aux riches. A cette époque, qui avait assez d'argent pour prêter cette somme ? les riches ! Curieusement, ils avaient exactement en caisse l'argent que l'on venait de leur donner. C'est bien foutu !
Non seulement, on leur a donné de l'argent. Non seulement, il a fallu faire un prêt pour ces cadeaux. Mais en plus, ils ont voulu des intérêts. Et aujourd'hui, la dette c'est ça ! Principalement, les intérêts de l'argent qu'on leur a déjà remboursé.
En gros, vous dites que vous allez faire un cadeau à un gamin quand il sera grand. Vous finissez par le lui donner à sa majorité. Mais lui vous réclame de lui payer des intérêts tout le reste de votre vie. Il y a des baffes qui se perdent.
Voilà toute l'histoire. Mais avant d'aborder les solutions, regardons comment est instrumentalisée cette dette des cadeaux faits aux riches.
On veut nous faire croire que le problème proviendrait des services publics qui nous protègent. Pour nous, dans les campagnes, l'image est assez simple à comprendre. Prenez un paysan qui cultive un champ de blé d'une année sur l'autre. Chaque année, il achète 1 000 euros de semence et son rendement est exceptionnel : 20 fois la mise (je prends cette valeur pour faire le lien avec le budget de l'état).
Imaginez qu'un type de la ville vienne lui réclamer 500 euros et l'oblige à prendre cet argent sur sa semence. Le paysan lui dira « c'est débile ce que tu me demandes. Je vais perdre la moitié de ma récolte. Tu vas me faire perdre 10 000 euros pour 500 euros déconomie. Je te payerai après la moisson ! »
Mais, un paysan a la tête sur les épaules, lui. Il sait qu'il ne faut pas réduire les services publics si l'on veut récolter.
Il y en a plusieurs. Nationalisons les banques ! Obligeons la BCE à prêter aux états ! Arrêtons les cadeaux aux riches ! Obligeons les riches à rembourser les intérêts illégitimes qu'ils nous ont volés ! Développons les services publics !
A l'exception du Conseil National de la Résistance, tous les partis qui se sont succédés, depuis l’extrême droite (travail-famille-patrie) de la fin des années 30 à nos jours, ont obéi aux marchés et réduit les services publics.
Si, comme les grecs, nous disions “NON !” à l'austérité ?
La crise ne provient pas de dépenses superflues, mais d'un manque de recettes organisées. C'est donc bien une crise de la recette.
Alors, s'il vous plaît, la prochaine fois que vous entendez « la crise de la dette », n'hésitez pas à reprendre votre interlocuteur et dites-lui « Tu veux parler de la crise de la recette ! ». Ce sera l'occasion d'engager la conversation et de le rendre intelligent à son tour.
Ce qui est formidable avec l'intelligence c'est qu'on peut la transmettre en la conservant.
François