LNOBPL : trois scénarios en débat

Par Roland LE SAUCE

Article original sur roland-lesauce.elunet.fr
Proposé pour la Une du FSL par Jackie





Le projet ferroviaire Liaisons Nouvelles Ouest Bretagne Pays de la Loire (LNOBPL) est actuellement soumis à débat public, selon les dispositions du code l’environnement qui prévoit que l’opportunité du projet et ses principales caractéristiques soient débattus avec l’ensemble de la population concernée. Une série de réunions publiques est prévue durant 4 mois, de septembre à décembre 2014. J’y étais le 24 septembre à Vannes. Mais c’est quoi ce projet de lignes nouvelles de chemin de fer.

Ce projet consiste à aménager, à long terme, en 2030 et au delà, le réseau ferroviaire des régions Bretagne et Pays de Loire pour, selon ses promoteurs, rendre le train plus performant, dans l’intérêt des populations des deux régions. Réseau Ferré de France (RFF), propriétaire et gestionnaire du réseau ferré national, a élaboré ce projet en partenariat avec les deux régions, les conseils généraux bretons et de la Loire Atlantique, et les Métropoles de Rennes, Nantes et Brest.

Il vise à répondre aux défis suivants :

  1. démographique de l’Ouest de la France dont la population sera en forte croissance dans les prochaines décennies ;
  2. d’attractivité économique alors que ces régions connaissent des mutations sources de désindustrialisation ;
  3. de cohésion territoriale avec l’apparition d’une conurbation de l’est breton au détriment de l’ouest et du centre Bretagne déjà fragilisé et insuffisamment desservi.

Il a pour objectif d’améliorer l’accessibilité de la pointe bretonne (Brest et Quimper à 3 h de Paris), de dégager des possibilités d’évolution à long terme du réseau par une augmentation du nombre de trains qui circulent, de renforcer le réseau inter-ville et mieux irriguer les territoires, de rapprocher les villes de Rennes et de Nantes par des dessertes rapides et cadencées, de desservir le futur aéroport du Grand Ouest communément appelé Notre Dame des Landes (NDDL). Trois scénarios, avec des variantes, sont proposés, pour un coût variant entre 3,10 milliards d’€ et 5,55 milliards d’€, pour des gains de temps 6 à 23 minutes selon les gares et les trajets.

Les promoteurs du projet proposent un gain de 10 minutes pour la majorité des gares situées à l’ouest de Rennes, un temps de parcours inférieur à 1 heures entre Rennes et Nantes avec doublement des dessertes sur ce tronçon de ligne, et un renforcement des dessertes périurbaines de ces deux villes. La commission nationale du débat public met en ligne tous les documents concernant ce projet. Lors des réunions publiques ces mêmes documents sont mis à disposition.

A la lecture de ce dossier, je ferai ces premières remarques, que j’ai en partie formulées à Vannes sous forme de questions comme le prévoit les textes pour un débat public de ce type (nous disposons d’une minute pour poser une question et de 3 minutes pour émettre un avis). Il y a d’abord le périmètre de l’étude et sur lequel repose le débat : il exclu le centre Bretagne ouest en ignorant l’axe ferré nord/sud, de St Brieuc à Auray. C’est du foncier disponible, donc pas à acquérir ; et il est évident que les questions environnementales ne sont plus du même ordre avec une ligne existante qu’une à créer. La mise en valeur de ce barreau transversal breton répondrait à de nombreux besoins de déplacement quotidiens des bretons, participerait au désenclavement du centre Bretagne, permettrait de relier les ports du Légué et de Lorient, et ferait que l’effet Bretagne Grande Vitesse (BGV) profite vraiment à tous les bretons. Il m’a été répondu que si cet axe nord/sud n’est pas intégré dans l’étude cela ne veut pas dire que l’on ne s’en préoccupe pas : RFF avec la Région Bretagne va réaliser des travaux sur la voie pour améliorer son exploitation, fret actuellement. Affaire à suivre.

Gagner 10 minutes, mettre à tout prix Brest et Quimper à 3 heures de Paris en réalisant de nouvelles lignes ferroviaires, est-ce le seul choix technique ? Ne peut-on investir dans l’amélioration de l’existant sans lignes nouvelles pour accroître le nombre de trains, avec la signalisation embarquée par exemple, ou dans le matériel roulant, tout en excluant le recours au train pendulaire qui ne donne pas entièrement satisfaction là où il existe. C’est non.

Les trois scénarios présentés sont établis avec l’idée préconçue que l’aéroport NDDL est réalisé. Ne peut-on avoir des scénarios sans cette hypothèse ? En effet, plus on s’éloigne de cet aéroport, plus la chalandise bretonne est faible : 43% du trafic provient de la Loire Atlantique contre 11 % du Morbihan, 9% de l’Ille et Vilaine, 4% du Finistère et 3% des Côtes d’Armor. Les représentants de la commission nationale présents à Vannes m’ont annoncé qu’elle a demandé à RFF de retravailler ces scénarios avec cette hypothèse. Donc acte.

La question énergétique est également importante. Selon les éléments apportés par RFF, la consommation d’électricité d’un TGV Duplex (à 2 étages) double entre 200 et 250 km/h, et double à nouveau entre 250 à 320 km/h. La construction de lignes nouvelles a pour objet de faire circuler les trains à grande vitesse, à minimum 250 km/h, voir plus. Où va-t-on trouver cette énergie lorsque l’on sait que la Bretagne est déficitaire en la matière ? Comment va-t-elle être transportée et distribuée ? La réponse n’est pas dans le dossier, mais RFF dit s’en préoccuper.

Ce projet met en évidence le renforcement de la métropolisation des villes de Rennes et de Nantes (dans le cadre de l’Arc Atlantique) et de Brest, agglomérations devenues Métropoles, connectées à des villes phares distributives de l’effet BGV. Dans un cadre de libéralisation du transport ferroviaire voyageurs dès 2019, confortée par la réforme ferroviaire votée au printemps dernier, il y a lieu, de mon point de vue, à s’interroger à ce que va être la desserte TGV dans les prochaines années des villes intermédiaires situées en zone urbaine drainant le rural et le littoral à l’exemple d’Auray.

Ce projet doit aussi favoriser l’attractivité économique de la Bretagne nous dit-on. Le périmètre d’étude exclu comme je l’ai dit précédemment le centre Bretagne ouest ; l’accent étant mis sur l’axe Rennes- Nantes et sur le littoral pour développer notamment le tourisme. Ne va-t-on pas accentuer la villégiature, la résidence secondaire qui déjà est fortement présente et accélérer un vieillissement de la population bretonne, déjà marqué, sur le littoral ? N’y a-t-il pas d’autres investissements plus prioritaires comme le numérique ? La mobilité d’aujourd’hui, physique, ne va-t-elle pas devenir virtuelle demain ? La Bretagne n’a-t-elle pas une carte à jouer dans ce domaine ?

Voilà bien un dossier complexe, certes, mais qui demande à être mieux partagé, travaillé. D’autant plus que la participation citoyenne à Vannes était bien en dessous de ce qu’il faudrait. Peu d’élus en charge d’exécutifs aussi, ils ne semblent pas être intéressés, aucun du Pays d’Auray. Alors tous aux prochaines réunions, à Lorient le 14 octobre à 19 h au Palais des congrès par exemple.



les_actualites/lnobpl_trois_scenarios_en_debat.txt · Dernière modification : 30/09/2014 14:55 de webmestre